www.solidarites.org

Tefi Randriamarolo, log admin

Publié le mardi 5 juin 2012
Tefi Randriamarolo

Quand es-tu arrivé ?

J’ai mis le pied en Mauritanie le 08/04/2012 à 00h30 après un briefing de 5 jours à Nouakchott (NKC), je suis arrivé à Bassiknou le 13/04/2012.

Ta première impression ?

À mon arrivée, j’étais heureux et en même temps j’essais de mesurer dans ma tête le défi qui m’attend. Il y a du boulot je me suis dit que même si c’est un grand défi pour moi comme c’est ma première expérience, j’étais sûr que je m’en sortirai.

Bref je n’ai vu un camp de réfugiés que dans le journal télévisé et du coup à mon arrivée, j’ai senti un léger pincement au cœur en voyant les conditions de vie des gens. Mais en même temps ça m’a donné du courage pour bosser, nos bénéficiaires sont là.

Comment étaient les gens ? La santé ?

En apparence, les gens sont calmes, ils circulent, les enfants jouent, ils font la queue sur les quelques points d’eau installés à l’époque. Bref, ils essaient de vivre dans les conditions rudimentaires du camp.

Avec ton équipe, quelles ont été vos premières activités ?

Nos premières activités : installation des bladders qui servent de réservoir d’eau où les gens puisent de l’eau pour leurs besoins. Ces bladders sont alimentés par des camions citernes qui font les tours de bladders en bladders. Ces camions prennent de l’eau à un forage à peu près à 4 km de l’extrémité du camp.

Il y avait combien de personnes à ce moment là ?

Il y avait entre 15 et 20 000 réfugiés au début de nos activités.

Avez-vous pu répondre aux besoins en eau de tous ?

C’est toute une question car le nombre de réfugiés n’est pas connu exactement (il s’agit d’une estimation du HCR). Néanmoins au mois d’avril on est arrivé à une estimation de 10 litres/personnes/jour et la norme est de 15. Pour info au mois de mars, on était entre 8 à 9 litres/pers/j.

Vous bossez avec d’autres ONG ?

Au début dans le domaine de l’eau et assainissement, il n’y avait que SI et MSF Belgique puis vers fin avril, INTERMON OXFAM est arrivé. Il y a aussi le CICR et le Croissant Rouge mauritanien dans l’intervention EHA.

Chacun dans son coin ou en collaboration ?

Une réunion de coordination est tenue 2 fois par semaines pour organiser les activités entre ONG, et une réunion de coordination spéciale pour celles qui travaillent dans le EHA a lieu une fois par semaine. Il y a une collaboration et une organisation entre acteurs.

Et aujourd’hui, vous en êtes où de vos activités ? Vous ne faites que de l’EHA?

En tout SI a installé 33 bladders et au mois de juin, nous avons géré une flotte de 9 camions citernes qui prennent de l’eau sur 2 forages. En ce moment, nous sommes en train de mettre en place un mini réseau pour alimenter 16 bladders directement et réduire la flotte de camion. D’ailleurs il n’y a plus que 6 camions en ce moment car le réseau a commencé à fonctionner depuis la fin du mois de juin. Concernant la réalisation de ce projet, nous sommes heureux, mais il reste encore beaucoup de défis.

Quels défis ?

Vivre à Bassikounou est un défi ! Il y a l’éloignement (1 295 km de Nouakchott), à 200 km (04h30min de trajet) de l’aéroport le plus proche (mais d’ici peu, l’aéroport de Bassikounou sera ouvert).

Un autre défi de Bassikounou qui est très important : la sécurité. La ville est très proche de la frontière malienne.

Le climat en général est dur surtout la chaleur, il faisait souvent plus de 50°C avant la saison des pluies. Et avec la pluie en ce moment, toutes les pistes sont devenues des mares d’eau stagnantes.

Cela crée-t-il des problèmes d’hygiène ? Des menaces de choléra ?

Choléra : pour le moment à BSK, je n’en ai pas entendu mais le risque est là.

Problèmes d’hygiène : oui, car déjà, l’odeur créée par ces eaux sales est très nauséabonde.

Quand vos activités vont-elles se terminer ?

Pour BSK, y avait 3 projets : l’un s’est terminé au mois de mai, le 2ème se terminera au mois d’août et le dernier au mois de septembre mais la coordo et le desk sont en train de négocier des prolongements car les besoins existent encore. Les réfugiés sont encore là, ils ne sont pas encore repartis chez eux.

Nous envisageons donc de rester dans ce domaine mais la mission envisage aussi d’avoir une action en sécurité alimentaire dans une autre région de la Mauritanie.

Combien de réfugiés sont présents actuellement ?

En ce moment, le HCR estime qu’il y a 96 751 personnes au camp.

Y-a-il encore des réfugiés qui arrivent ?

Si je me base sur l’estimation HCR, y a encore un afflux car la semaine dernière, y avait 90 919 personnes soit à peu près 5 800 nouveaux en une semaine (selon HCR).

Donc au final, il y a plus de besoins aujourd’hui qu’au début de votre intervention ?

Théoriquement, il y a plus de besoins et de personnes qu’au début. Il n’y a pas eu d’enquête pour le confirmer mais c’est notre évaluation.

Il y a suffisamment de latrines, etc ?

Pour les latrines, nous sommes aux alentours de 1 200. 1 116 latrines pour être précis !

Et toi, ton quotidien, c’est quoi ?

Je m’occupe de la logistique : tout ce qui est achat, équipements durables. Je m’occupe aussi de la gestion de parc (auto, informatique et immobilier).

En admin, je m’occupe du budget, des finances et de la trésorerie, de la compta et des RH.

Je m’occupe aussi des relations avec les autres ONG et autorités locales.

La gestion du budget et des RH, pas trop dur dans ce contexte ?

C’est notamment le budget car comme y a pas de banque ici, tout doit être transféré de NKC donc, il faut bien planifier à l’avance tous les besoins financiers.

Comment le vis-tu ?

Ça n’est pas facile. Le travail en lui-même n’est pas difficile mais c’est surtout les adaptations et les sacrifices qu’il faut faire qui rendent la mission plus difficile. Néanmoins, c’est une expérience très enrichissante professionnellement et personnellement. C’est bien de commencer par une mission si « dure », tout me semblera plus facile après !

En plus, c’est réjouissant de voir les personnes avoir de l’eau et des conditions d’hygiène meilleures. Cela dit, au quotidien, franchement, il n’y a rien à faire. Il n’y a pas moyen de sortir du cadre du travail : pas de restau, pas de café, pas de stade ni spectacle… Les produits alimentaires disponibles sont très réduits. Par exemple pour avoir du poisson, il faut les acheter lorsqu’il y a une voiture qui fait le déplacement à Nema (là où il y a l’aéroport) et encore ça n’est pas systématique qu’il y en ait…