Rencontre avec Fanja Ratsiferana, directrice pays Haïti

En Haïti, les crises politiques, économiques et sociales s’exacerbent depuis 2019 et plongent la population locale dans le chaos le plus total. La recrudescence de la violence des gangs provoque un fort sentiment d’insécurité et oblige de nombreuses familles à se réfugier dans des camps de personnes déplacées. Fanja Ratsiferana, Directrice Pays Haïti pour SOLIDARITÉS INTERNATIONAL, fait le point de la situation sur place.

Pourriez-vous nous présenter vos missions ?

Je m’appelle Fanja, je suis Malgache et maman de trois garçons. J’ai plus de 16 ans d’expérience en coordination opérationnelle des programmes de développement et d’urgence. Depuis septembre, je travaille en Haïti comme directrice pays. Je commence ma journée en faisant un état des lieux sécuritaire. La situation en Haïti étant très volatile, c’est indispensable pour assurer la sécurité de l’équipe. Je suis responsable du fonctionnement de la mission et de la coordination humanitaire avec divers acteurs. L’une des contraintes étant le manque de personnel, nous devons adapter nos actions en fonction de nos moyens.

Quelle est la situation humanitaire en Haïti ?

Elle est alarmante. Les conflits entre les gangs armés, les kidnappings et les décès ont augmenté. Du fait de cette insécurité, la population se déplace. L’Organisation Internationale pour les Migrations dénombre entre 140 000 et 150 000 personnes déplacées internes à Port-au-Prince et en Artibonite. La vulnérabilité des Haïtiens et des Haïtiennes s’accentue : plus de 5,2 millions de personnes ont besoin d’une assistance humanitaire selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies.

Que fait SOLIDARITÉS INTERNATIONAL en Haïti ?

Nous menons des actions en sécurité alimentaire dans les quartiers proches de Port-au-Prince. Avec le retour du choléra, nous avons développé une réponse rapide aux alertes et renforcé les actions de sensibilisation. Dans les camps, nous approvisionnons en eau les personnes déplacées et prévoyons d’installer des douches et des latrines. Enfin, nous réhabilitons les infrastructures d’accès à l’eau dans des écoles.

Quelles sont les difficultés sur place ?
Nous sommes confrontés à de nombreux défis. La présence des gangs limite nos déplacements et nos actions. Le taux d’inflation, très élevé, renchérit le coût des opérations. Enfin, une série de facteurs rend difficile l’anticipation des évènements. Nous devons faire preuve d’agilité pour répondre aux besoins. Le danger est présent même si, à ce jour, les ONG sont épargnées. Il peut compliquer la vie quotidienne : nos protocoles de sécurité sont contraignants avec un couvre-feu et des déplacements limités à l’essentiel pour nos employés expatriés. En venant en Haïti, il faut être prêt à vivre de cette manière.