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Conférence sur le Soudan : malgré des résultats positifs, la crise humanitaire en cours nous oblige à plus d’effort

Publié le mardi 16 avril 2024

 

Nous accueillons favorablement la tenue de la « Conférence internationale humanitaire pour le Soudan et ses voisins » organisée par la France, l’Allemagne et l’Union européenne, cruciale pour remettre la guerre au Soudan au cœur des agendas médiatiques et politiques mondiaux. 

Alors que le monde observe la crise avec apathie et silence, le peuple soudanais continue de souffrir. La situation humanitaire dans la région est catastrophique, avec près de 30 millions de personnes confrontées à la faim, aux maladies et aux déplacements forcés. L’économie et les services de base s’effondrent. À cet égard, la Conférence était cruciale pour accélérer les engagements financiers et la volonté politique. 

Si nous saluons les promesses de financement et les déclarations de soutien formulées lors de la conférence, nous demeurons préoccupés par le sort des personnes touchées par la crise en cours qui ne montre aucun signe d’amélioration. 

Réactions de Kevin Goldberg, directeur général de SOLIDARITÉS INTERNATIONAL, qui a pris la parole au nom de la communauté des ONG internationales pendant la conférence : 

« Même si la totalité des fonds demandés avait été collectée, les ressources n’auraient même pas pu répondre aux immenses besoins. Au Soudan, on parle d’environ 24,8 millions de personnes nécessitant une assistance. Près de la moitié de la population ! De plus, il est possible qu’une partie des fonds promis ne soient pas entièrement additionnels, mais plutôt réaffectés de précédentes allocations. Cette crise exige des ressources additionnelles et disponibles immédiatement. Si l’aide humanitaire est vitale, elle ne peut être la seule réponse. Les bailleurs doivent de toute urgence réinvestir dans l’aide au développement pour la région afin de renforcer la résilience des communautés et de leurs systèmes face à cette crise prolongée. Les engagements de la Commission européenne ont offert un exemple positif à cet égard. »  

« Obtenir des financements est crucial, mais ce n’est pas suffisant. Sans accord de paix en vue, nous avons besoin d’un accès sûr et total pour acheminer l’aide, nous devons renforcer la pression diplomatique pour y parvenir. À l’heure actuelle, les obstacles bureaucratiques, les restrictions de visa, le nombre insuffisant de points de passage aux frontières et les combats continuent de restreindre gravement notre capacité à soutenir efficacement les personnes qui ont besoin d’aide. Toutes les parties au conflit doivent respecter le droit international humanitaire et protéger les civils et les travailleurs humanitaires. De nombreuses déclarations des représentants des gouvernements ont été encourageantes, et les efforts mondiaux doivent se poursuivre après la conférence. » 

« N’oublions pas l’effet domino de cette crise. L’instabilité du Soudan menace toute la région. C’est pourquoi une réponse internationale plus coordonnée est cruciale pour faire face efficacement à la crise.  Plus de 1,8 million de personnes ont fui depuis avril 2023, cherchant refuge auprès de voisins déjà fragiles, confrontés à leurs propres défis humanitaires et économiques – le Tchad, le Soudan du Sud, l’Égypte, l’Éthiopie et la République centrafricaine. Cette crise des déplacements se prolonge de plus en plus, de nombreux réfugiés vivant maintenant dans l’incertitude depuis des mois, voire des années. Nous devons aller au-delà des solutions temporaires et travailler à des solutions durables qui leur permettent de reconstruire leur vie dans la dignité. 

« Et le pire est peut-être à venir. Les populations du Soudan et de la région ne peuvent pas se permettre d’attendre. Le coût de l’inaction est tout simplement trop élevé : plus l’accès humanitaire est restreint et plus la crise s’aggrave, plus de personnes auront besoin d’aide. » 

 

Note aux rédacteurs :

Le Soudan est « la crise de déplacement la plus rapide au monde ». À l’intérieur de ses frontières, plus de 6,5 millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays, contraintes de fuir leur foyer pour se mettre en sécurité. Le pays accueillait déjà plus d’un million de réfugiés avant le conflit actuel, soit la deuxième population de réfugiés la plus importante d’Afrique. Un total de 1,8 million de personnes sont déplacées hors des frontières du Soudan. Au total, le conflit a déplacé un nombre stupéfiant de 8,5 millions de personnes, au 15 avril 2024. 

La conférence n’a permis de recueillir que la moitié des 4,01 milliards de dollars demandés par les Nations Unies : 1,4 milliard de dollars pour un plan régional d’intervention pour les réfugiés visant à aider 2,7 millions de personnes dans cinq pays voisins, et 2,7 milliards de dollars pour un plan d’intervention humanitaire national ciblant 14,7 millions de personnes au Soudan même – alors que 24,8 millions de personnes en ont besoin. 

L’ampleur de la crise au Soudan et dans les pays voisins, où près de 30 millions de personnes ont besoin d’assistance, nécessite un effort d’aide important. Plusieurs facteurs compliquent et renchérissent considérablement le coût de cette intervention. 

  • Instabilité sécuritaire : l’acheminement de l’aide est dangereux et coûteux en raison de la situation sécuritaire imprévisible. Des ressources sont nécessaires pour atténuer ces risques et assurer la sécurité des travailleurs humanitaires.
  • Défis logistiques : les infrastructures dégradées et l’accès limité aux zones de conflits augmentent considérablement les coûts de transport du personnel et de matériel.
  • Facteurs économiques : l‘inflation élevée, la dépréciation de la monnaie et les perturbations des chaînes d’approvisionnement, contribuent à l’augmentation du coût des produits essentiels, ce qui exerce une pression supplémentaire sur les ressources déjà limitées allouées à l’aide humanitaire.