TCHAD / CRISE ALIMENTAIRE
Au centre du pays, SOLIDARITES INTERNATIONAL aide les habitants de la région du Batha à faire face à la sécheresse. Aux ménages et aux cultivateurs les plus fragiles, nos équipes distribuent, grâce à un système de foire, rations alimentaires et semences. Dans leurs villages, nos experts réhabilitent les points d’eau.
A plus de 500 km à l’est de Ndjamena, accessible après onze heures de piste, la ville d’Ati borde le fleuve Batha. Ou ce qu’il en reste. Complètement asséché depuis septembre, le cours d’eau laisse son lit vide serpenter vers l’horizon.
Le taux de pluviométrie est un des plus faible du pays, annonce Philippe Bonnet, notre chef de mission. Cette région fait aussi partie de celles où l’on enregistre le plus de cas de malnutrition aigüe sévère, 900 rien qu’en janvier, soit le double par rapport à 2011. Autant d’hommes, de femmes et surtout d’enfants qui se trouvent en danger de mort.’’
C’est là, au milieu de cette région touchée de plein fouet par la crise alimentaire, que SOLIDARITES INTERNATIONAL a ouvert en mars dernier une mission afin d’aider près de 16 000 personnes à faire face à la sécheresse.
La production céréalière a baissé de 40%, celles des autres cultures de 28%. Les taux de malnutrition constatés sont supérieurs aux seuils d’urgence. En plus, le cholera a emporté 11 personnes en 2011 dans le département de Fitri. Pour répondre à ces problématiques, nos programmes comprennent trois volets, poursuit-il : l’accès aux biens alimentaires, la relance de la production agricole, et l’accès l’eau potable.’’
Des graines volées aux fourmis
À quelques kilomètres de notre base d’Ati, le village d’Ambassatna s’apprête à accueillir une foire alimentaire organisée par nos équipes. Myriam, au milieu d’un groupe de femmes assises sur une natte à l’ombre d’une échoppe, est arrivée la veille. Avec ses sacs en toile de jute, elle attend avec impatience le début de la distribution des coupons qui vont leur permettre d’acheter viande, céréales et légumes aux commerçants sélectionnés par SOLIDARITES INTERNATIONAL. Les habitants de son village se sont cotisés pour louer une charrette afin de transporter les denrées qui leur auront été distribuées.
‘‘Le prix des céréales et des légumes a doublé par rapport à l’année dernière, explique-t-elle. Nous devons emprunter de l’argent pour en acheter. Du coup, la plupart d’entre nous ne mangent qu’une seule fois par jour. Nous complétons nos bouillies de mil avec le dum, le fruit du palmier, et avec des graines que nous nous résignons à aller chercher dans les fourmilières. Moi, j’ai 5 enfants. Heureusement que mes voisins nous aident.’’
Veiller à une plus grande diversification alimentaire
Céréales, légumes, huile, viande, poisson séché, ail, oignon… Les commerçants finissent d’installer leurs étales au milieu du marché fermé. A l’entrée, chaque famille s’est vue attribuer des coupons de couleurs pour acheter leur ration.
‘‘L’ensemble du programme s’appuie sur les communautés locales, souligne Julie Vray, notre responsable en sécurité alimentaire. C’est la clé du succès. En lien avec nos équipes, ce sont les comités de village qui sélectionnent les ménages les plus fragiles : femmes seules sans revenus, personnes handicapées, orphelins en charge d’une fratrie… Quant à ce mode de distribution alimentaire, il nous permet de réinjecter du liquide dans l’économie locale en faisant travailler les commerçants et les grossistes locaux. Ces derniers sont en lien direct avec la population qui veille ainsi elle-même à la qualité et à la fraicheur des produits. Ce système est aussi pour nous le moyen de veiller à une plus grande diversification alimentaire. Une donnée cruciale sur laquelle nous insistons quand nous rendons visite aux familles qui bénéficient des foires.’’
La distribution durera trois jours au total. Le temps d’accueillir en tout quelque 600 ménages des environs, qui reviendront dans un mois pour une nouvelle distribution. D’ici là sera organisée une foire aux semences, cette fois à destination des cultivateurs les plus pauvres. Les graines de haricots, d’arachide, de sorgho et de mil qui seront fournies ont été testées par nos équipes qui les ont fait germer.
Des récoltes dévastées par les criquets
‘‘Il faut les aider jusqu’aux prochaines récoltes, en septembre, glisse Serge Mahal, de l’Office national de développement rural. Cette année, c’est très difficile. Des paysans ont semés trois fois. Lors de leur première tentative, les semis n’ont pas pris faute de pluies suffisantes. Idem pour la 2e. Quant au 3e essai, les récoltes ont été en grande partie dévastées par les criquets. Du coup, la période de soudure a été très longue. Les familles ont mangé leurs semences et les prix ayant augmenté, elles n’ont pas les moyens d’en acheter suffisamment. La saison des pluies arrive et elles n’ont rien à planter. Ce système de foire est d’autant plus efficace que SOLIDARITES INTERNATIONA a choisi des semences locales, adaptées au sol et au climat. Le ciel fera le reste.’’
Faute d’eau, les villages se vident
Autre réponse à la sécheresse, SOLIDARITES INTERNATIONAL réhabilite les points d’eau qui se font de plus en plus rares : puits, forages, marres pour le bétail… Sous une chaleur de quelque 45°C, femmes et enfants parcourent toujours plus de kilomètres pour aller cherche de l’eau pas toujours potable. Faute d’eau, les villages se vident. Dans celui de Kitara, l’école a dû fermer. Lucien Doglobé, notre responsable des programmes eau, hygiène et assainissement, y étudie la possibilité de remettre en service le forage installé sur un terreplein :
‘‘Il faut avant tout s’assurer que l’eau est de bonne qualité. Car il y a fréquemment du natron (bicarbonate de sodium) qui la rend dangereuse pour la santé. Pour vérifier qu’elle est bien potable, encore faut-il que j’arrive à aller la puiser… Si elle n’est pas polluée, je demanderai aux habitants de former un comité de gestion du point d’eau pour en gérer l’utilisation et à la maintenance. Ce n’est qu’à cette condition que nous assurons au village un accès à l’eau pérenne.’’
Pendant ce temps-là, à Ati, notre expert en sécurité alimentaire vient d’arriver en provenance de SOLIDARITES INTERNATIONAL. Sa mission, trouver les meilleurs moyens d’aider les habitant du Batha à être moins vulnérables à des épisodes de sécheresse de plus en plus rapprochés et de plus en plus intenses. Au Sahel peut-être plus qu’ailleurs, survivre, c’est s’adapter.
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