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Mali : reportage à Bamako, auprès des déplacés internes

Publié le vendredi 12 juin 2020

Refuge de nombreuses minorités fuyant les conflits dans leur pays, Bamako abrite plusieurs sites de déplacés aux conditions de vie précaires. Engagées à leurs côtés depuis 2019, nos équipes se sont mobilisées pour les aider à se protéger du Covid-19.

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Pour échapper aux violences, plus de 2 500 personnes se sont réfugiées en périphérie de la capitale malienne.

En périphérie de Bamako, où se sont développés plusieurs sites de déplacés internes, tout le monde a un peu la même histoire : un départ précipité pour fuir les violences terroristes ou les conflits intercommunautaires, le regret d’avoir perdu ou dû laisser tout derrière soi et une résignation à rester ici, faute de mieux… ‘’Nous avons été chassés de notre village Tagari Peulh, dans le cercle de Koro. On m’a pris ma moto et mon père a été tué. Nous avons ensuite passé la nuit dans la forêt et le lendemain nous avons pris un bus pour venir jusqu’ici’’, explique Abdoulaye Bolly, 46 ans, rencontré sur le site de Mabilé.

‘’Ceux qui nous ont attaqués ont tout pris et brûlé nos maisons’’
Salimata Bellou, déplacée

Croisée sur le même site, Salimata Bellou, 32 ans, raconte, elle, avoir ‘’passé la nuit au Burkina Faso’’, après avoir quitté son village proche de la frontière car ‘’il n’y avait pas de route’’ pour aller directement à Bamako. ‘’Ceux qui nous ont attaqués ont tout pris et ils ont brûlé nos maisons’’, se désole-t-elle. À Faladié, un autre site de déplacés, Abdoulaye fait part, lui aussi, de son ‘’sentiment de désespoir’’. ‘’Je me suis installé ici avec ma famille. Je n’ai pas cherché autre chose’’, confie-t-il.

Comme eux, plus de 2 500 Maliens vivent dans les quatre sites de déplacés que compte Bamako : Mabilé et Faladié mais aussi Niamana et Senou. Ayant perdu pour la plupart leurs moyens de subsistance, ils doivent repartir de zéro dans cette immense ville qu’ils ne connaissent pas. Vivotant grâce à des travaux journaliers (gardiennage, ménages…), ils sont rattrapés par la pauvreté et le manque de nourriture. À cela s’ajoute l’insalubrité croissante des sites qui les accueillent.

  • 21,9 millions d'habitants
  • 186ème sur 191 pays pour l'Indice de Développement Humain
  • 449 855 personnes bénéficiaires

MANQUE D’INFRASTRUCTURES

Chaque jour, de nouveaux déplacés arrivent sur ces sites. Or les infrastructures qui peinaient déjà à répondre aux besoins sont largement insuffisantes. ‘’Le centre de Mabilé est assisté en eau et en électricité par le gouvernement et les déplacés vivent dans une ancienne école. Mais à Niamana, les déplacés vivent en tentes ou logements de fortune car aucun abri n’a été mis en place pour eux’’, détaille Emmanuel Kamaté Limasi, responsable de notre programme de réponse rapide au Mali.

Le site de Faladié est, lui, situé sur une zone non-constructible traditionnellement occupée par des éleveurs de passage. Ce terrain vague, faisant également office de décharge, abritait pourtant jusqu’à fin avril le plus grand nombre de déplacés internes de la capitale malienne (environ 1 600 personnes). ‘’A Faladié, il n’y avait accès ni à l’eau ni à l’électricité. Le site n’ayant jamais été approuvé par le gouvernement, les constructions ou aménagements par les acteurs indépendants y étaient interdits’’, précise Emmanuel Kamaté Limasi.

SITUATION SANITAIRE AGGRAVÉE PAR LA MENACE DU COVID-19

Depuis novembre 2019, SOLIDARITÉS INTERNATIONAL intervient sur ces quatre sites de déplacés pour apporter une aide dans le domaine de l’accès à l’eau, à l’hygiène et à l’assainissement.

Nos équipes fournissent par exemple 6 000 m3 d’eau potable deux fois par jour aux 300 déplacés de Niamana. Deux blocs de quatre latrines et quatre douches ont également été construits et un comité d’entretien et de gestion formé par SOLIDARITÉS INTERNATIONAL fait respecter les consignes d’hygiène sur le site.

Des kits d’hygiène ont été distribués à 330 familles

Suite à l’incendie de Faladié le 28 avril 2020 (voir encadré ci-contre), le site de Mabilé a dû accueillir subitement 900 nouveaux habitants. Dans un contexte sanitaire aggravé par la menace du Covid-19 (le premier cas confirmé a été enregistré à Bamako le 25 mars 2020), nos équipes ont donc déployé une réponse d’urgence. Des kits d’hygiène (savons, seaux, jerrycans, lessive etc.) ont été distribués sur le site de Mabilé à 330 ménages dont 220 familles venues du site de Faladié. Des représentants communautaires ont également été formés aux règles et gestes barrières pour lutter contre la propagation du virus.

Afin de permettre aux déplacés de vivre le plus dignement possible, l’amélioration des conditions d’hygiène sur ces sites est cruciale, mais leur intégration dans la vie et l’économie de Bamako reste compliquée. La plupart rêvent simplement de pouvoir retourner dans leurs villages d’origines.

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Face à l’épidémie de Covid-19, nos équipes ont distribué des kits d’hygiène aux déplacés pour leur permettre de se protéger contre la propagation du virus. Elles ont également formé des représentants communautaires aux gestes barrières.
CATASTROPHE À FALADIÉ


Dépourvus de système de gestion des déchets, les habitants du site de Faladié avaient pour habitude de brûler leurs détritus. Attisé par des vents forts le 28 avril dernier, le feu s’est malheureusement propagé très rapidement et a réduit en cendres l’ensemble du site en quelques heures. Aucune victime n’est à déplorer, mais les dégâts matériels sont considérables.
Arrivées avec le strict minimum, les familles n’ont pas eu le temps de sauver leurs affaires. Certaines ont même perdu leur bétail, soit leur principale source de revenu, et se retrouvent encore plus démunies qu’auparavant.

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