À la veille du sommet onusien pour le Climat, plus de 200 ONG unissent leur voix pour exhorter la France à mettre en place d’urgence un mécanisme de suivi des politiques menées, tant au niveau local qu’international, pour s’assurer qu’elles soient cohérente avec les «objectifs de développement durable» signés par la France.
La France vient d’adopter sa feuille de route pour la mise en œuvre des « objectifs de développement durable » (ODD) au moment où se tient le sommet dédié des Nations unies et quatre ans après l’adoption de l’Agenda 2030 et l’Accord de Paris. Cette adoption intervient alors que la situation de la planète ne cesse de s’aggraver et que le réchauffement planétaire pourrait être bien pire que prévu selon un rapport d’experts et expertes français du CNRS et de météo France rendu public cette semaine.
Des feux des forêts primaires amazoniennes et africaines aux révoltes sociales de celles et ceux laissés pour compte dans nos sociétés modernes, tout est dorénavant lié par une mondialisation non maitrisée. Qu’elles soient sociales, environnementales ou économiques, à ce jour, les causes et conséquences ne sont traitées, ni par des actions spécifiques transversales, ni par une approche globale et cohérente !
Or l’agenda des Nations unies des ODD, adopté en 2015, devait répondre à cela en faisant le lien entre les crises environnementales, sociales et économiques, entre les actions locales et l’échelle mondialisée. Il définit des actions concrètes dans tous les domaines de nos sociétés à mettre en œuvre d’ici 2030 pour un monde durable. Cet agenda concerne tous les pays, autour d’objectifs universels ambitieux : éliminer la pauvreté et la faim, permettre à toutes et tous de vivre en bonne santé, garantir un accès à l’éducation, à une eau potable et à des toilettes, mais aussi transformer les modèles agricoles et techniques, lutter contre les changements climatiques, l’érosion de la biodiversité et la dégradation des terres, favoriser des modèles économiques inclusifs reposant notamment sur des emplois dignes et un partage équitable des bénéfices économiques pour contribuer au développement de sociétés en paix… Cet « Agenda 2030 » affirme l’ambition de « ne laisser personne de côté », c’est à dire de prendre en considération les personnes les plus précaires ou les plus marginalisées dans l’ensemble des politiques publiques.
Dans le contexte actuel, cette ambition nécessite, partout, à tous les niveaux, des transformations structurelles technologiques, sociales, environnementales, économiques et politiques de nos sociétés. Elle demande en outre aux États de prendre la responsabilité de la mise en œuvre de ses actions et appelle tous les acteurs et actrices, entreprises, société civile, collectivités territoriales, à inscrire leur activité dans une feuille de route commune.
Pour les acteurs et actrices françaises non-étatiques du développement durable, l’année 2019 constitue une étape clef pour la mise en œuvre de cet agenda par la France. En effet, après avoir lancé une réflexion commune en 2018, le gouvernement présente un « livret politique » devant traduire de manière opérationnelle la mise en œuvre des ODD dans ses politiques tant nationales qu’internationales.
Ce « livret politique » doit donner une perspective de long terme permettant de poser des trajectoires de transition vers un développement durable.
Le profond changement de méthode et de vision – intégrée et globale – que proposent l’agenda 2030 et les actions définies dans ses 17 objectifs de développement durable ne peut se réaliser qu’en s’appuyant sur une mobilisation politique pleine et entière au plus haut niveau de l’État, afin de créer un cadre pour l’action de l’exécutif et du législatif et soutenir l’action des acteurs non-étatiques.
A ce titre, nous demandons que soit mis en place un mécanisme de suivi de la cohérence des politiques entre elles, cette démarche devant également être appliquée en matière d’articulation entre les niveaux locaux, nationaux, européens et internationaux. Chacune des politiques sectorielles doit apporter une attention particulière aux objectifs de lutte contre la pauvreté, les inégalités et les changements climatiques ainsi que ceux liés à l’égalité de genre et à l’inclusion de la société civile. Des indicateurs relatifs à ces enjeux devront être élaborés pour en rendre compte.
L’Agenda 2030, en s’appuyant sur les conventions internationales, et notamment l’Accord de Paris ainsi que l’Accord sur le financement d’Addis Abeba, constitue le seul cadre international pouvant guider un réel changement de cap. Il crée les conditions d’une résilience environnementale, sociale et économique pour toutes et tous au sein de nos sociétés, en France comme ailleurs dans le monde, en enclenchant la nécessaire transition dont elles ont besoin. Il est encore possible d’agir, et la France a un rôle majeur à jouer pour changer de trajectoire et permettre de réelles avancées. Ne gâchons pas cette chance.
PhilippeJahshan, président de Coordination SUD (plateforme nationale des ONG françaises de solidarité internationale représentant plus de 170 structures).
Liste des signataires :
Association 4D, Marc Darras, vice-président
Action contre la Faim, Thomas Ribémont, président d’honneur
Acting For Life, Bertrand Lebel, directeur exécutif
Agri-Ethique France, Ludovic Brindejonc, directeur général
AIDES, Aurélien Beaucamp, président
Aide Odontologique Internationale (AOI), Hubert Weil, président
Antenna France, Julien Bello, délégué général
Association des Marocains de France, Souad Chaouih, présidente
Association la Voûte Nubienne, Benoît Lambert, président
Artisans du monde, Gérald Godreuil, délégué général
ATD Quart Monde, Claire Hédon, présidente
CARI, Patrice Burger, président
Les CEMEA, Isabelle Palanchon, responsable du pôle Europe international
CEPAZE, Laurette Gosso, présidente
CFSI, Yves Le Bars, président
Cités Unies France, Roland Ries, président – maire de Strasbourg
CLONG-Volontariat, Daniel Verger, président
Cnajep, Frédérick Pairault, président
Coalition Eau, Sandra Métayer, coordinatrice
Commerce Equitable France, Julie Stoll, déléguée générale
CRID, Emmanuel Poilane, président
Educasol, Carole COUPEZ, présidente
Equipop, Dr Alain Marié, président
Etudiants et développement, Ruvie Gambia, président
Experts-Solidaires, Eric Buchet, président
FAIR[E], Olivier Cabrera, président
Fonda, Nils Pedersen, président
FORIM, Mackendie Toupuissant, président
France Nature Environnement, Michel Dubromel, président
France Volontaires, Jacques Godfrain, ancien ministre, président
GERES, Marie-Noëlle Reboulet, présidente
GESS – RéCoSol Nord et Sud, Antoinette-Anita Adjeoda, déléguée générale
GRET, Henry de Cazotte, président
Groupe initiatives, Pierre Jacquemot, président
Guayapi, Claudie Ravel, fondatrice et dirigeante
Handicap International, Xavier du Crest de Villeneuve, directeur France
HumaniTerra, Xavier Dufrenot, Directeur
IFAID Aquitaine, Ghislain Bregeot, directeur
Initiative et Développement, Marie Françoise Pluzanski, présidente
Kinés du Monde, Jean-Paul David, président
Max Havelaar France, Christophe Roturier, président
Partage, Yolaine Guérif, directrice générale
Plan International France, Yvan Savy, directeur
Planète Enfants et Développement, Stéphanie Selle, directrice
Planning Familial, Véronique Séhier, coprésidente
Première Urgence Internationale, Thierry Mauricet, directeur général
Réseau Foi et Justice Afrique Europe, Jean-Louis Marolleau, secrétaire exécutif
Ritimo, Emmanuel Charles, co-président
Secours islamique France, Rachid Lahlou, président
Sidaction, Florence Thune, directrice générale
SOL – Alternatives Agroécologiques et Solidaires, Jacques Godard, co-président
Solthis, Louis Pizarro, directeur général
Solidarité Laïque, Anne-Marie Harster, présidente
Solidarités International, Antoine Peigney, président
Terre et Humanisme, Françoise Vernet, présidente
Vision du Monde, Camille Romain des Boscs, directrice générale
YMCA France, Hervé de la Morsanglière, président