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Darfour : notre réponse d’urgence pour faire face aux risques sanitaires

Publié le mardi 22 novembre 2022

Le Darfour, région située à l’ouest du Soudan, est le théâtre d’une crise humanitaire majeure depuis plusieurs décennies. SOLIDARITÉS INTERNATIONAL était présente sur place de 2004 à 2009. Après avoir réouvert une mission dans l’est du pays en 2021, nos équipes sont de nouveau présentes au Darfour depuis l’été 2022 afin de répondre à l’arrivée massive de personnes déplacées à la suite de conflits dans la région.

Justine Muzik Piquemal, responsable géographique et Fanny Vagné, coordinatrice terrain, reviennent sur les actions menées dans cette zone ces derniers mois au Darfour.

 

Quel était le contexte sur place lorsque SOLIDARITÉS INTERNATIONAL a décidé d’intervenir de nouveau ?

Justine Muzik Piquemal (JMP) : SOLIDARITÉS INTERNATIONAL a réouvert une mission au Soudan en 2021 pour répondre à la crise des personnes réfugiées érythréennes et éthiopiennes dans l’Etat de Gedaref, à l’est du pays. Mais ça n’était pas la seule priorité. Il fallait également intervenir dans l’ouest, au Darfour, plus précisément à Al Geneina, capitale de la région qui subit une des plus grosses crises permanentes qui existe aujourd’hui au Soudan. Cette ville de 20 000 habitants a vu sa population plus que tripler avec l’arrivée de 100 000 personnes déplacées au cours de l’année 2021.  

Fanny Vagné (FV) : À Al Geneina, il y a une centaine de sites accueillant des personnes déplacées qui ont dû fuir les attaques armées dans leur région. À vrai dire, la plupart de ces personnes sont déplacées depuis le début du conflit au Darfour, en 2003-2004. Elles vivaient dans des camps autour de la ville d’Al Geneina qui sont ensuite devenus des villages ; une sorte de banlieue autour de la ville. Ces villages ont été à nouveau attaqués en janvier et en avril 2021, obligeant les habitants à se déplacer à l’intérieur de la ville d’Al Geneina. La population s’est donc installée dans des bâtiments publics comme des cours d’écoles, des cours d’hôpitaux, des universités, etc. Tous les abris sont faits de bâches, couvertures, morceaux de bois ou de paille et sont donc très vulnérables aux pluies.

 

Quelles sont les activités menées par SOLIDARITÉS INTERNATIONAL au Darfour ?

JMP : Après deux mois d’analyse de contexte et de discussions avec le gouvernement local, nous avons pu ouvrir notre bureau en juillet 2022. Nous sommes intervenus en urgence début novembre, durant la saison sèche, pour ramener de l’eau potable dans les camps. Pendant cette période, les températures atteignent 40-45 degrés, une chaleur intenable ! Arrive ensuite la saison des pluies, vers le mois d’août. Il est alors nécessaire d’assainir les latrines, pour que les conditions hygiéniques et sanitaires ne s’aggravent pas. Nous avons donc loué des camions de vidange en collaboration avec la municipalité. Travailler conjointement permet de partager notre savoir-faire et notre expertise en matière d’eau, d’assainissement et d’hygiène pour permettre à nos partenaires de prendre le relai le jour où SOLIDARITÉS INTERNATIONAL ne sera plus là.  

FV : Nous avons organisé une intervention d’urgence en eau, assainissement et hygiène : nous avons mis en place un approvisionnement en eau potable grâce à des camions citernes et construit des latrines dont nous avons organisé l’assainissement. Nous avons aussi l’intention de distribuer des kits d’hygiène à la population.

 

Au regard de cette situation sanitaire, pouvez-vous nous parler des risques épidémiques ?  

JMP : Dès le mois d’août, il y a eu des suspicions de cas de choléra et de variole du singe. Les camps sont surpeuplés et, en saison des pluies, les latrines se remplissent rapidement et la population est obligée de déféquer à l’air libre. De mes yeux, j’ai vu des enfants déféquer dans la rue. Pour cette raison, nous avons dirigé tous nos efforts sur les projets d’assainissement.    

FV : Le choléra est une grande crainte à chaque saison des pluies. Le risque avec les pluies diluviennes est que les latrines débordent et que les matières fécales (humaines et animales) se retrouvent au niveau des points d’eau et soient ensuite consommées, entraînant des possible maladies diarrhéiques comme le choléra. C’est pourquoi nous sommes intervenus en urgence pour mettre en place la vidange des latrines par camion aspirateur dès le début de la saison des pluies.

 

Pourriez-vous nous parler des personnes qui ont mis en place cette intervention d’urgence d’envergure ?

FV : Nous avons une équipe, qu’on appelle « Programme », composée de gens qui ont beaucoup d’expérience dans la zone mais aussi auprès d’autres ONG nationales, internationales ou encore aux Nations unies. 

JMP :  Nous avons la chance d’avoir une équipe qui a une vraie vision de l’aide qu’elle veut apporter et comment l’amener ; une vraie réflexion sur la stratégie de soutien en réponse aux besoins des populations. Ce que j’ai trouvé impressionnant, c’est la capacité de cette petite équipe à comprendre et anticiper le contexte, à organiser l’intervention et à collaborer avec les autorités locales pour plus d’acceptance et d’efficacité en partageant un but commun : venir en aide à la population.

 

Quelles sont les perspectives pour cette mission et notre intervention au Darfour ?  

JMP : Nous souhaitons poursuivre nos projets en eau, assainissement et hygiène en continuant les campagnes d’hygiène basiques pour le lavage de mains, l’amélioration de l’accès à l’eau potable, la désinfection des latrines, la formation de comités d’hygiène etc. Nous travaillons aussi sur un projet de mise en place d’un réseau d’eau à Al Geneina.  

FV : Nous sommes en cours de développer un nouveau projet de soutien en gestion des ordures solides. Ce projet va permettre de collecter les déchets au niveau des ménages et des sites où vivent les personnes déplacées. Nous sommes également en train de programmer des évaluations des besoins dans les huit localités de l’ouest du Darfour. En ce moment, on se concentre beaucoup sur la zone de Kulbus et Sirba, où il semblerait qu’il y ait de gros besoins. Mais, avant d’agir, il faut d’abord avoir une bonne analyse du contexte pour être sûr d’apporter l’aide qu’il faut aux personnes qui en ont besoin. 

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