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Fuir la guerre, s’échouer à Yida

Publié le lundi 3 septembre 2012

Les combats, la faim et le début de la saison des pluies les ont poussés à abandonner leur maison et à prendre la fuite. Au bout de leur épuisant exode, un camp de sable boueux se dresse sur des kilomètres, sans eau ni toilettes. Ou si peu. Pour les 60 000 réfugiés soudanais qui sont parvenus jusqu’ici, Yida est une bouée de sauvetage précaire, où les humanitaires pourront leur donner à manger et à boire, peut-être sauver leurs enfants malades.

OUBLIÉS

Les combats, la faim et le début de la saison des pluies les ont poussés à abandonner leur maison et à prendre la fuite. Au bout de leur épuisant exode, un camp de sable boueux se dresse sur des kilomètres, sans eau ni toilettes. Ou si peu. Pour les 60 000 réfugiés soudanais qui sont parvenus jusqu’ici, Yida est une bouée de sauvetage précaire, où les humanitaires pourront leur donner à manger et à boire, peut-être sauver leurs enfants malades. C’est aussi une impasse où ils tentent de ne pas perdre pieds et de rester en vie. SOLIDARITES INTERNATIONAL y intervient en urgence depuis juin.

Abandonner sa maison, quitter son village. Marcher jour et nuit entre les flaques et la boue, se cacher. Avoir peur pour sa vie et celle de ses enfants. Passer enfin cette frontière invisible. Et au bout du chemin, trouver Yida.
Venus de la province soudanaise du Sud Kordofan, ils sont jusqu’à 1 000 à se présenter chaque jour au point d’enregistrement que tient le Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR) au nord de ce qui ne devait être initialement qu’un centre de transit. Parmi les centaines de personnes qui font déjà la queue ce matin devant le bureau d’enregistrement du HCR, Mary est.

Depuis le début de la guerre il y a un an, j’ai toujours pensé rester chez moi, témoigne Mary, arrivée hier, avec son mari, ses 6 enfants et 25 personnes de son village situé dans les Monts Nouba. D’autant qu’il y a eu une accalmie. Mais les combats ont repris. Et à cause des bombardements, nous n’avons pas pu cultiver nos terres. Là-bas, il n’y a plus rien à manger. Les derniers tirs, il y a deux jours, m’ont décidée à fuir. Je ne sais pas comment cela se passe ici. Mais quoiqu’il arrive, je vais m’adapter. »

Situé à seulement 16 km du Soudan, le camp accueille aujourd’hui plus de 60 000 personnes. Abritées dans des huttes de bambous fabriquées par leurs soins et disséminées sous les arbres, elles se sont regroupées par familles, s’entourant des membres de leur village qui ont fui eux aussi. Sous l’effet de l’intensification du conflit qui oppose groupes rebelles et gouvernement soudanais, plus de 30 000 hommes, femmes et surtout enfants, sont arrivées ces trois derniers mois. Un afflux massif aux conséquences dramatiques qui a poussé SOLIDARITES INTERNATIONAL a envoyé une équipe d’urgence pour améliorer leurs conditions de vie, plus que précaires.

Aménagement et chloration des points d'eau

Aménagement et chloration des points d’eau, nettoyage et remplacement des récipients d’eau, construction de latrines, session de promotion à l’hygiène… Autant d’actions vitales pour enrayer les épidémies de maladies diarrhéiques auxquelles succombent de dizaines de personnes chaque semaine, en majorité des enfants.

Manque d’eau & conditions d’hygiène dramatiques

Chaque semaine, le centre de santé de MSF enregistre au moins 20 décès, témoigne Opu Mainal Islam, responsable de notre programme d’urgence. Tous des enfants de moins de cinq ans. Ils sont morts des suites d’une épidémie de diarrhée, dont la source est le manque d’eau et d’hygiène dans le camp. Il n’y a 7 points d’eau et seulement quelques centaines de latrines. Résultat, les gens font leurs besoins dans la nature. Les mouches, porteuses de maladie, affluent. Les enfants tombent malades. Et puis les familles ont seulement 6 litres par jour et par personne. Pour boire et cuisiner, ça peut suffire. Mais pas pour se laver, même seulement les mains. »

Équipés de jerrycans cassés, troués, noirs de crasse, pataugeant dans la boue, des centaines de femmes et d’enfants se relaient aux robinets de la rampe de distribution du principal point d’eau du camp. Partout autour des flaques d’une eau verdâtre s’étendent sur plusieurs m². Il n’y a pas un endroit du sol sableux qui soit sec.

 

En attendant d’aménager les nouveaux forages en passe d’être réalisés, il nous faut absolument améliorer l’état des points d’eau existants, dont l’état est source de contamination. Nous allons effectuer les réparations nécessaires et construire des plateformes de drainage afin que l’eau ne stagne pas. Le problème se situe aussi dans les contenants d’eau qu’utilisent les familles. Il faut plus de chlore pour tuer les bactéries. Nous allons donc mener une campagne de chloration de tous les jerrycans pendant 40 jours et en distribuer de nouveaux pour remplacer ceux qui sont vraiment en mauvais état. Pour remédier au manque de latrines, il faut identifier les endroits qui en sont le plus dépourvues et voir avec les communautés qui y vivent comment s’organiser pour les construire, où les installer et les entretenir. SOLIDARITES INTERNATIONAL interviendra dans les parties périphériques du camp, là où s’installent les nouveaux arrivants. »

Comment préserver mes enfants des maladies ?

Nadia et son filsAssise sur sa natte, derrière sa moustiquaire bleue, précieuse relique emportée de sa vie d’avant, Nadia veille sur son dernier né. Avec son mari et son fils aîné, elle a fui sa terre, dans les Monts Nouba, en avril. Alors enceinte de 6 mois, elle est partie avant de ne plus en avoir la force.

Deux mois plus tard, j’ai accouché d’un garçon, se souvient-elle, jetant un coup d’œil sur les deux maigres valises à roulettes que son mari a réussi à trainer jusqu’ici. Nous l’avons appelé June, parce qu’il est né en juin pendant le premier mois de la saison des pluies. L’hôpital était rempli d’enfants mourants et de mères souffrantes. Quand notre aîné est tombé malade en juillet, j’étais terrifiée. Atteint de diarrhée, il ne tenait plus sur ses jambes. Au centre de santé, ils m’ont dit qu’il y avait trop de monde. Nous l’avons soigné à l’aide d’une plante que l’on trouve ici et que l’on mélange à l’eau. Et même si depuis quelques jours, il va mieux, ajoute-t-elle, démunie, je suis très inquiète. Comment les préserver des maladies avec toutes ces mouches et quand on a si peu d’eau ? »

Pour elle comme pour les milliers de personnes qui affluent chaque jour à Yida, notre équipe d’urgence a amorcé un travail vital qui durera plusieurs mois. Si la saison des pluies a réduit le flot de réfugiés, combats et bombardements perdurent. Le camp de Yida n’est pas prêt de disparaître. Il s’agit de faire en sorte qu’il n’engloutisse plus la vie de celles et ceux qui y échouent.

RD

 AIDER

Avec 168 €, vous permettez à 100 personnes d’avoir accès à l’eau potable.

Soit 42 € après déduction fiscale.

Soudan du Sud

Contexte et action
  • 12,44 millions d'habitants
  • 191ème sur 191 pays pour l'Indice de Développement Humain
  • 190 115 personnes bénéficiaires