www.solidarites.org

Eclairage : "Les sud soudanais manquent de tout"

Publié le vendredi 5 juin 2015

La situation au Soudan du Sud se dégrade un peu plus chaque jour. Les combats entre l’armée et les forces rebelles provoquent de nouveaux déplacements de population et l’économie du pays est au bord de l’asphyxie. Au cœur de ce drame, la vie de millions de sud soudanais est menacée. Décryptage de Bérengère Tripon, responsable géographique pour la région.

Quelle est la situation actuelle au Soudan du Sud ?

Le Soudan du Sud subit depuis un an et demi la pire crise, humanitaire, politique, économique et sécuritaire de sa courte existence – le pays est indépendant depuis le 9 juillet 2011. Fin avril, les combats entre les forces gouvernementales du président Salva Kiir et les rebelles de l’ex premier ministre Riek Machar ont repris de plus belle notamment dans le  « Great Upper Nile » (états du Jonglei, du Nil Supérieur et d’Unité) au nord du pays. Pendant quelques jours, les rebelles ont été en contrôle de l’une  des capitales régionales, Malakal, qui a changé de mains plus de 7 fois depuis le début de la crise, mais les forces gouvernementales l’ont repris rapidement.

Qu’est-ce qui a poussé au conflit, à quand remonte-t-il ?

Contrairement à ce que l’on peut penser, la crise actuelle ne trouve pas sa source dans les tensions entre le Soudan et le Soudan du Sud. Le conflit actuel est bien le résultat de la crise politique survenue entre le président Salva Kiir et son ancien premier ministre, Riek Machar. Les deux hommes étant d’ethnies différentes, le conflit politique est aussi  de manière schématique un conflit opposant deux groupes armés sur une base ethnique – principalement Nuers et Dinkas, deux principales ethnies du pays. En résumé, empêché de faire entendre sa voix lors d’un rassemblement du parti en décembre 2013, Riek Machar le quitte en claquant la porte. Le soir même, le président tente de le faire arrêter, l’accusant de fomenter un coup d’état. Riek Machar ne se laisse pas faire et prend alors la tête d’un groupe armé opposé à la politique du gouvernement. Débute alors un conflit à Juba, la capitale, qui s’étend rapidement à l’ensemble du pays.

Pourquoi se bat-on plus dans le nord que dans le reste du pays ?

Depuis le début du conflit, les violences ont concernées essentiellement les zones où les deux groupes ethniques se côtoient, et ces territoires se situent essentiellement dans un grand quart nord-est du pays. Par ailleurs, cette zone est aussi celle où se trouvent les derniers puits de pétrole encore en activité du pays. L’or noir étant la seule ressource du Soudan du Sud, le contrôle des puits assure à celui qui les tient une manne financière, première marche pour le contrôle du pays.

Quelles sont les conséquences de ce conflit sur l’économie ?

Si les habitants du nord du pays subissent de plein fouet les exactions des deux camps, ce sont tous les sud soudanais qui plongent chaque jour un peu plus dans la précarité. La monnaie locale est en train de dégringoler. Le taux de change y était de 1 dollar pour 3 SSP il y a quelques mois, sur le marché parallèle, il est passé à 1 pour 13/15 ces dernières semaines et la chute se poursuit. Pour le moment, les prix des denrées de première nécessité ont été multipliés par 3 au cours des 2 derniers mois. Et la situation devient dramatique pour la population. Mêmes ceux qui ont un emploi pourraient se retrouver en grande difficulté.

Quelles est la situation humanitaire ?

La situation humanitaire est catastrophique. Les sud soudanais manquent de tout. L’ONU estime que 12 millions d’entre eux ont besoin d’assistance humanitaire et que 2,5 millions sont menacées par une crise alimentaire sévère. On compte également 2 millions de déplacés internes qui vivent pour certains dans des campements situés au sein même des enceintes des soldats de l’ONU, comme c’est le cas à Malakal ou à Juba, la capitale. D’autres s’entassent dans des camps improvisés ou dans les communautés et se retrouvent sans aucune protection. Et c’est sans compter les 200 000 réfugiés qui ont fui les violences qui persistent dans le sud du Soudan entre le gouvernement de Khartoum, et le groupe armé appelé SPLA-Nord en lutte pour une reconnaissance de leurs particularités religieuses et traditionnelles au sein du Soudan.

Comment Solidarités International agit pour venir en aide à la population ?

Dans la capitale Juba, mais aussi plus au nord, à Malakal ou dans le camp de Wau Shilluk, les équipes de SOLIDARITÉS INTERNATIONAL apportent chaque jour une aide indispensable à près de 150 000 personnes à travers tout le pays. 40 000 déplacés reçoivent ainsi de l’eau grâce aux équipes de SOLIDARITES INTERNATIONAL a Wau Shilluk. À Juba, nous approvisionnons en eau potable un camp de déplacés improvisé dans une base des Nations Unies. En l’absence d’autre solution technique, nous assurons cette mission uniquement par camion. Ici, comme dans la base de Malakal où un autre camp s’est établi, les équipes sont en charge de construire et d’entretenir douches et toilettes (vidange, gestion des déchets). Elles couvrent ainsi des besoins de plus de 50 000 personnes toujours loin de chez elles. SOLIDARITÉS INTERNATIONAL agit également dans le reste du pays grâce à son mécanisme de réponse rapide aux urgences. Enfin, nous avons depuis le début de l’année 2015 mis en place un programme d’assistance monétaire inconditionnelle auprès de 3 000 familles, soit plus de 21 000 personnes autour de Wau Shilluk.

Aidez nos équipes

JE FAIS UN DON 

Soudan du Sud

Contexte et action
  • 12,44 millions d'habitants
  • 191ème sur 191 pays pour l'Indice de Développement Humain
  • 190 115 personnes bénéficiaires