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Le Cameroun, au péril de sa vie

Publié le mardi 22 juillet 2014

Responsable de notre équipe d’urgence, Sandra Lamarque est depuis juin au Cameroun où 100 000 réfugiés nécessitent de l’aide après avoir marché pendant des mois pour se réfugier ici. Parmi eux, il y a Ibrahim qu’elle a rencontré sur le site de transit bondé de Garoua Boulai.

Cameroun réfugiésIbrahim vient de Gaga, ville de l’Ouest centrafricain qui vit de l’exploitation et du commerce de l’or. Ibrahim était un commerçant prospère. « Mais l’or, m’a-t-il dit, est vite devenu une malédiction, suscitant tour à tour la convoitise et les attaques des milices de tous bords. » En décembre dernier, les anti-balaka ont fini par brûler nombre de maisons et de commerces. Ibrahim n’a pas eu d’autre solution que de fuir vers le Cameroun avec sa famille.

La souffrance et la mort sur la route de l’exil

Il m’a raconté qu’il leur a fallu deux mois pour atteindre la frontière. Deux mois de peur et de privations. Deux mois de marche interminables à travers la forêt, pour tenter d’échapper aux milices et aux coupeurs de route. Quelques bâches les maintiennent à l’abri de la nuit. Le bétail qu’ils ont emmené avec eux leur permet de survivre. Mais un matin, des anti-balaka les surprennent, leur volent tout. Ibrahim, son épouse et sa fille ont juste le temps de s’enfuir. « Pas mon frère, m’avoue-t-il avec pudeur, froidement exécuté avec ses deux enfants en bas âge. » S’en suivent alors les semaines les plus difficiles. La marche continue, la douleur et la faim au ventre. Il faut se contenter d’une soupe d’herbes bouillies, et de l’espoir d’atteindre la Cameroun.

« Avant nous donnions aux nécessiteux. Regardez aujourd’hui… »

Cela fait maintenant quatre mois qu’Ibrahim vit ici. Je l’ai rencontré dans le site de transit de Garoua Boulai. Les conditions de vie y sont précaires. Les premiers réfugiés ont pu bénéficier d’une tente ou d’un abri collectif. Les autres n’ont d’autre choix que de construire leur cahute avec des branchages et des matériaux de récupération.

« Avant, nous habitions une maison, dormions dans un lit, m’a confié Ibrahim. Ici, seuls les plus chanceux ont une natte. Les autres dorment à même le sol. Avec ce froid, c’est très dur. Surtout pour les enfants. »  La nourriture fait également défaut. Les distributions sont incomplètes et irrégulières. A l’origine, le site de Garoua Boulai devait être un simple point de transit pour les réfugiés. Malheureusement, les camps du HCR sont saturés. Certains vivent ici depuis plus d’un mois.

Pendant l’entretien, l’épouse d’Ibrahim parle à peine. Son regard ne croise jamais le mien. « C’est parce qu’elle a honte, finit par me dire Ibrahim. Avant, nous étions riches. C’était à nous de donner aux nécessiteux. Regardez aujourd’hui, nous n’avons même pas de quoi nous nourrir. »

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