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Moyen-Orient : les victimes civiles piégées par les soubresauts de l’histoire

Publié le vendredi 18 avril 2025

Depuis le 7 octobre 2023, le Moyen-Orient a connu des déflagrations en chaîne qui ont aggravé les crises humanitaires de toute la région. Violentées par l’Histoire et les conflits, de nombreuses personnes ont tout perdu et vu leur vie menacée.

Thomas Janny, directeur régional en charge de la Syrie, du Yémen, du Liban et de l’Irak pour SOLIDARITÉS INTERNATIONAL fait le point sur une année de travail humanitaire dans la région.

 

Comment résumerais-tu la situation humanitaire au Moyen-Orient ?

Le Moyen-Orient est en ébullition, avec des crises multifactorielles complexes qui perdurent de longue date. SOLIDARITÉS INTERNATIONAL est présente en Syrie depuis 2012, au Liban depuis 2013, au Yémen et en Irak depuis 2017. Et l’année dernière, en février 2024, nous sommes entrés dans Gaza pour y fournir de l’eau potable principalement. Le changement fondamental qu’a constitué l’attaque du 7 octobre en Israël a rajouté de la complexité, de la souffrance et des activités militaires sur des crises préexistantes. Gaza est devenue l’épicentre de l’horreur, mais les réactions en chaîne ont créé une crise humanitaire d’ampleur régionale. Partout, la situation est devenue encore plus précaire, à l’exception notable de l’Irak, pays moins touché mais qui reste menacé par la situation géopolitique.

Gaza, mars 2025

Une des principales bascules de ces derniers mois a été la chute du gouvernement de Bachar el-Assad en Syrie. Dans quel état est le pays à présent ?

En dehors de la capitale, Damas, tout le pays est détruit. Après 14 années de terreur et de conflits, les besoins sont sans commune mesure. La tâche s’annonce immense pour reconstruire le pays. On estime que 6 ou 7 millions de personnes sont déplacées dans le pays, et presque autant sont réfugiées dans les pays voisins ou en Europe. Le souhait général de ces personnes est de rentrer chez elles. Certaines sont d’ailleurs allées voir leur maison pour finalement retourner dans leur camp, car tout n’est que ruine dans leur zone d’origine. Il n’y a ni travail, ni accès à la santé ou à l’éducation sur place. Tout est à reconstruire et la situation politique est toujours incertaine. On ne s’attend donc pas à des retours massifs.

 

Quelles ont été les conséquences sur le travail de SOLIDARITÉS INTERNATIONAL ?

Avant la chute du régime de Bachar Al Assad et en l’absence d’autorisation pour intervenir en zone gouvernementale, nous travaillions exclusivement le nord-ouest et le nord-est syrien, où nous restons l’un des principaux acteurs humanitaires pour l’eau, l’hygiène et l’assainissement. Depuis le renversement du régime, nous planifions d’étendre nos activités dans les gouvernorats d‘Alep, de Hama et au sud de Damas.

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Le Yémen a-t-il subi les déflagrations des événements récents du Moyen-Orient ?

Oui, en réponse aux tirs de missiles et attaques de drones contre des bateaux marchands par les Houtis en Mer Rouge, des bombardements israéliens et américains ont eu lieu contre des cibles militaires au Yémen et sur le port d’Hodeïda. La guerre au Yémen, entre le Nord et le Sud, a généré des besoins humanitaires énormes depuis 2015 pour une population très pauvre. Les tensions actuelles viennent exacerber cette situation. Notre action y consiste à répondre aux besoins les plus urgents, par exemple quand des personnes réfugiées dans un camp doivent à nouveau se déplacer. Nous soutenons aussi les personnes vulnérables qui doivent faire face aux inondations, au choléra et à la malnutrition.

Gaza, épicentre de l’horreur

Après 19 mois de conflit dans la bande Gaza, de nombreux Palestiniens ont été tués ou blessés, et les services publics sont complètement effondrés. La population subit une crise alimentaire grave et l’enclave manque d’eau potable. Depuis le 2 mars, un blocus complet a été instauré par les autorités israéliennes, suivi par une reprise des hostilités le 18 mars. Le flux des camions alimentant la bande de Gaza a immédiatement cessé. Nos programmes de production et distribution d’eau fonctionnent encore, grâce aux quelques stocks constitués pendant la durée du cessez-le-feu. Dans quelques semaines toutefois, le fioul va manquer, ce qui nous conduira à stopper les unités de dessalement de l’eau que nous opérons.

Avec un don de 150 €, soit 37,5 € après déduction fiscale, vous nous permettez de distribuer de l’eau potable à une famille gazaouie dans une zone difficile d’accès pendant deux semaines.

En septembre 2024, Israël a lancé une campagne de bombardements sur le Liban. SOLIDARITÉS INTERNATIONAL avait-elle des équipes sur place ?

SOLIDARITÉS INTERNATIONAL était présente au Liban depuis des années avec des programmes humanitaires ciblant les réfugiés syriens et les populations libanaises les plus pauvres, mais aussi des programmes à long terme visant à renforcer la résilience des communautés. Nous travaillions par exemple à réduire les risques liés aux inondations en aménageant les rives de cours d’eau et nous développions des projets d’agroforesterie.  

Lorsque le Liban a subi des bombardements, notamment à sa frontière sud et dans la vallée de la Bekaa, le déplacement soudain de quasiment un million de personnes a rendu nécessaire des actions d’urgence. Nous avons été très réactifs. Il a fallu accéder à des zones de facto dangereuses, comme Baalbek ou les gouvernorats du Sud du Liban. Nous avons distribué, dans les centres d’accueil collectifs, des articles essentiels, comme de la nourriture, des kits d’hygiène ou le nécessaire pour les bébés. Nous avons réhabilité des latrines et des points d’eau.

 

Et qu’a changé le cessez-le-feu ?

À la signature du cessez-le-feu du 27 novembre 2024, la majorité des gens sont rentrés chez eux. Ils y ont malheureusement trouvé leurs villes et villages détruits. Les champs avaient parfois été minés, les infrastructures rendues inutilisables. Nous avons à nouveau adapté notre réponse pour accompagner ces personnes dans leur démarche de retour chez elles. Cela consiste à les soutenir dans la réparation de leurs maisons et des infrastructures et dans le développement de moyens de subsistance.

 

Comment envisage-t-on l’avenir proche au Moyen-Orient ?

Les besoins humanitaires sont plus forts que jamais. Nous nous préparons pourtant à la baisse des financements institutionnels de l’action humanitaire dans certaines zones. Dans ce contexte, la générosité des donateurs prend une importance toujours plus cruciale. Les civils victimes de la guerre doivent recevoir une aide humanitaire.

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