www.solidarites.org

Coup d’État au Burkina Faso : quel avenir pour les populations déjà fragilisées ?

Publié le mercredi 12 octobre 2022

Le 30 septembre dernier, le Burkina Faso a été ébranlé par un nouveau coup d’État seulement quelques mois après le renversement du président Kaboré et l’instauration d’un gouvernement civilo-militaire de transition. Ce nouveau putsch, “motivé”, selon les personnes responsables, par la dégradation continue de la situation sécuritaire dans le pays, est survenu quelques jours après l’attaque d’un convoi de ravitaillement à destination de la ville de Djibo par un groupe armé. Au moins onze morts sont à déplorer parmi les militaires, tandis qu’une cinquantaine de civils sont toujours portés disparus.

Cette crise politique est d’autant plus inquiétante qu’elle risque d’impacter sévèrement des centaines de milliers de foyers, déjà fragilisés par de nombreuses épreuves : la crise économique dans laquelle est plongé le pays, la crise alimentaire mondiale, l’insécurité croissante et les catastrophes climatiques notamment. S’y sont en outre récemment conjugués les blocus qu’ont connu plusieurs villes, dont Djibo et Sebba, qui se trouvent au cœur de la région du Sahel, épicentre de la crise sécuritaire. Ces blocus coupent, depuis plusieurs mois, les populations de toutes possibilités d’accès à des produits vitaux (eau, nourriture, médicaments, abris, etc.), et réduisent fortement l’accès de l’aide humanitaire dans ces zones.

À Djibo, chef-lieu de la province du Soum dans la région du Sahel, la population est ravitaillée au compte-gouttes depuis plus de sept mois et prise en étau entre la faim et la soif. Le dernier important convoi de ravitaillement de la ville n’est donc jamais arrivé à destination.

À Sebba, chef-lieu de la province du Yagha dans le Sahel, la situation alimentaire et nutritionnelle ne cesse d’empirer et l’insécurité grandissante a entraîné la fermeture de plusieurs centres de santé. Le système de soins, souffrant déjà d’un manque crucial de personnel et de financements, n’a plus la capacité de couvrir les besoins les plus urgents. Cette situation réduit les chances de survie des populations les plus vulnérables face à la malnutrition, aux maladies hydriques, au paludisme, à la mortalité maternelle et néonatale, etc.

Face à ces difficultés, SOLIDARITÉS INTERNATIONAL poursuit ses actions sur le terrain et adapte sa réponse humanitaire. À Djibo, pour pallier les besoins en alimentation, les équipes effectuent des distributions d’argent. « Dans une situation de blocus, les distributions alimentaires sont difficiles à réaliser ; nous effectuons donc des distributions d’argent afin que les populations puissent se procurer le peu de ressources disponibles sur les marchés locaux », explique

  • 21,8 millions d'habitants
  • 184ème sur 191 pays pour l'Indice de Développement Humain
  • 600 785 personnes bénéficiaires

Philippe Dianou, responsable des activités « sécurité alimentaire et moyens d’existence » de SOLIDARITÉS INTERNATIONAL au Burkina Faso. Nos équipes ont par ailleurs procédé à la distribution de filtres à eau « discrets », limitant le risque de vandalisation.

À Sebba, notre ONG, en collaboration avec Première Urgence Internationale, travaille au renforcement des structures de santé et à la réduction de la malnutrition. Ce programme, financé par le Bureau de l’Aide Humanitaire de l’Union Européenne (ECHO), s’appuie notamment sur la distribution de farine enrichie, le dépistage de la malnutrition chez les enfants, la réparation des infrastructures d’eau dans les structures de santé et la sensibilisation des populations aux bonnes pratiques alimentaires et nutritionnelles.

Il devient cependant de plus en plus difficile pour nos équipes d’accéder aux populations dans le besoin. Les zones d’intervention inaccessibles par la route sont de plus en plus nombreuses. De plus, la perturbation des vols affrétés par les Nations unies, liée au récent coup d’État et à la crise ukrainienne, pose également la question de la viabilité du recours à la voie aérienne. Or, le nombre de personnes vivant sous blocus et dans le besoin d’une aide d’urgence ne cesse d’augmenter. « Sans évolution rapide de l’accès à ces zones, et la possibilité pour les convois humanitaires de grande ampleur d’atteindre les populations, la dégradation de la situation sécuritaire et politique aura des effets dramatiques » conclut Philippe Dianou.

© Benny Jackson

La situation humanitaire au Burkina Faso est très critique : 4,9 millions de personnes ont besoin d’aide selon l’ONU. En avril 2022, le décompte officiel OCHA/CONASUR indiquait qu’1,5 million de personnes s’étaient déplacées à l’intérieur du pays, dont 285 000 à Djibo. En octobre 2022, les organisations humanitaires estimaient que le nombre de personnes déplacées avoisinait désormais les 2 millions.

Soutenez notre action sur le terrain

> Je fais un don