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Peggy Pascal, les sacs potagers

Publié le dimanche 4 mai 2014
Peggy Pascal

L’injustice comme terreau de son engagement

JOURNEE DE LA FEMME. Directrice de notre Département qualité des programmes*, Peggy Pascal fait partie des lauréates du Prix Terre de Femme Yves Rocher pour le concept de sac potager qu’elle a développé dans les bidonvilles de Nairobi avant de l’adapter dans plusieurs pays où des millions de personnes n’ont pas assez à manger.

 Loin du cliché de la scientifique ‘‘pur jus’’

Ingénieure agronome, je me suis lancé dans des études scientifiques pour réaliser mes rêves de petite fille. Je ne me voyais pas princesse, mais aventurière. J’ai décidé très tôt de travailler dans les pays du sud.
On est donc loin du cliché de la scientifique ‘‘pur jus’’. J’avais envie d’agir. Je suis partie en Afghanistan, au Kenya, au Mali. J’ai fait
ce que j’aime par-dessus tout : apprendre des autres. J’ai vécu et partagé le quotidien de gens qui ont toutes les difficultés à faire face aux dégâts climatologiques : sécheresse, inondations, déforestation, manque de terre, exodes forcés vers les villes et ses bidonvilles.

Des millions de gens n’ont pas assez à manger.

J’ai voulu faire de l’humanitaire précisément parce que je ne supporte pas l’idée selon laquelle des millions de gens n’ont pas assez à manger. Il existe des solutions très concrètes pour lutter contre cet état de fait. Encore faut-il les mettre en œuvre. Voilà pourquoi je suis entrée chez SOLIDARITÉS INTERNATIONAL.

Ma première mission, en 2008, a consisté à trouver des réponses aux problèmes de malnutrition au cœur d’un bidonville aux dimensions tentaculaires et où la densité de population explose, celui de Kibera, dans la capitale kenyane. Aider ne consiste pas à mettre les gens sous perfusion humanitaire, mais bien à leur donner les moyens de leur subsistance.

Des sacs pour nourrir les habitants des bidonvilles

Avec l’équipe terrain de SOLIDARITÉS INTERNATIONAL, nous avons ainsi développé un projet pilote très simple : un potager qui tient dans un sac. Nul besoin de grands espaces, ni de gros moyens pour faire pousser ses légumes. 7 sacs installés au pied d’un baraquement suffisent à fournir un repas par jour pendant sept jours. Les familles y font notamment pousser du soukouma wiki, une sorte de chou riche en protéines qui offre l’avantage
d’être hyper nutritif. Ce programme, mené auprès de plus de 30 000 familles, répond en partie au problème de malnutrition chez les jeunes enfants, mais aussi chez les personnes atteintes du sida dans ce pays ravagé par la maladie, car il permet de renforcer leurs dé-fenses immunitaires.

Transmettre et partager

Aujourd’hui, ce qu’on pourrait appeler le ‘‘It bag’’ (le sac qu’il faut avoir) a fait de nombreux émules. Nous avons recensé
cette année près de 240 000 sacs dans les cinq bidonvilles de la capitale kenyane. En plus de répondre à des besoins primaires et alimentaires, les sacs ont changé le visage de ces quartiers pauvres. La verdure a redonné le sourire aux gens. Ces sacs ont aussi recréé du lien social, du dialogue et
de la solidarité au cœur d’une société marquée par les tensions inter ethniques. On s’échange les petits conseils de jardiniers, on s’inspire des idées des voisins… bref, on discute et surtout on mange mieux. Si nous n’avons plus de financements pour ce programme, je suis fière de ce concept, précisément parce que l’idée continue son chemin toute seule. Les sacs se développent sans nous. C’était le but de notre action transmettre et partager.
* Jusqu’au mois de mars 2013.