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Syrie : « Dans les pas des déplacés »

Publié le jeudi 29 octobre 2015

Le conflit syrien, dans sa cinquième année, a poussé plus de 10 millions de personnes au déplacement, dont quatre millions hors des frontières. 70% de la population déplacée a besoin d’aide humanitaire. Andrea Magnano revient d’une mission d’un an comme Chef de Mission pour SOLIDARITÉS INTERNATIONAL. Il nous raconte son expérience.

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Que peut-on dire de la vie d’humanitaire en Syrie ?

Nous avons une équipe de 22 personnes travaillant sur la frontière turque, dans un couloir étroit du gouvernorat d’Alep, au nord du pays*. C’est la seule zone où les humanitaires ont la possibilité d’opérer. Les déplacés internes avec lesquels nous travaillons se logent au sein de communautés d’accueil ou dans des sites informels.

En raison de ce conflit, nos équipes suivent les déplacés, qui sont constamment en mouvement. Etre humanitaire là-bas est quelque chose de très compliqué ; on ne se sent jamais en sécurité dans de telles conditions. En tant qu’ONG internationale, nous représentons une menace pour certaines parties prenantes au conflit, car ils sont susceptibles de nous confondre avec des forces internationales. A cause de ce climat politique, il ne leur est pas facile de comprendre les principes humanitaires d’indépendance, d’impartialité et de neutralité.

Quelles activités les équipes mettent-elles en œuvre dans le pays ?

Nous avons développé un programme de paiement contre travail afin de soutenir les besoins primaires des populations. Nous avons commencé par proposer une aide monétaire de 30 000 livres syriennes (environ 140€) à près de 2700 ménages, ce qui leur a permis de subvenir à leurs besoins pendant deux mois. La plupart de nos bénéficiaires étaient des déplacés, mais nous incluons également les communautés d’accueil vulnérables, car elles sont tout aussi affectées par la crise. L’arrivée massive de déplacés a fortement touché leurs conditions de vie, car ils ont dû accueillir un grand nombre de personnes chez eux.

Nous travaillons aussi sur des projets agricoles et des activités de maraîchage, mais aussi des cliniques vétérinaires pour les éleveurs les plus vulnérables. Nous sommes la seule organisation qui teste des activités vétérinaires dans cette partie du pays. En plus de cela, nous allons distribuer 600 kits agricoles pour les cultivateurs.

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Y a-t-il de nouveaux projets à venir ?

La guerre a détruit beaucoup d’infrastructures communautaires et les populations n’ont pas de quoi les réparer. Nous aimerions donc fournir davantage de services d’eau, d’hygiène et d’assainissement (EHA). En revanche, il n’est pas aisé de mettre de telles activités en œuvre tant que nous opérons à distance depuis la Turquie. Nous rencontrons plusieurs obstacles ; par exemple pour nettoyer l’eau des rivières, nous avons besoin d’acheminer de la solution chlorée depuis la Turquie par camion. Mais cette solution peut également servir comme composant d’armes chimiques, donc il est difficile de l’introduire dans le pays. Un moyen serait d’approvisionner les fournisseurs dans le pays et de donner les moyens financiers aux populations d’acheter l’eau salubre.

Nous avons aussi remarqué que l’assainissement était un vrai défi. Les latrines ont subi des dégâts considérables et ne peuvent être réparées ; il nous faudrait installer de nouvelles latrines.

Après des années de combats, de nombreuses maisons ont été détruites. Nous voudrions aussi nous concentrer sur l’apport d’abris, mais il est impossible de construire dans ces conditions. Il y a un manque de capacités et de plus en plus de gens cherchent à traverser la frontière pour la Turquie, ce qui n’est pas facile sauf raisons médicales ou si l’on a de la famille là-bas. Il y a aujourd’hui 1,8 million de Syriens en Turquie. La plupart sont venus vivre avec leur famille.

Les activités d’argent contre travail en Syrie

Le projet de transfert monétaire a débuté en février 2013 dans le gouvernorat d’Alep. En 2014, SOLIDARITÉS INTERNATIONAL a poursuivi ce projet afin d’améliorer l’accès de 12 000 personnes à la nourriture et à d’autres biens de première nécessité. Les bénéficiaires décident eux-mêmes comment ils utilisent l’argent, afin de subvenir à leurs besoins les plus urgents. Jusqu’en septembre 2015, SOLIDARITÉS INTERNATIONAL était la seule organisation expérimentée dans les transferts monétaires dans le nord de la Syrie.

* En raison du danger que représente la présence de personnels expatriés en Syrie, SOLIDARITÉS INTERNATIONAL a décidé d’opérer en gestion à distance depuis la Turquie, avec des équipes syriennes employées par l’organisation pour mettre en œuvre les activités dans le pays. Ce personnel est soutenu et supervisé par les équipes expatriées de l’autre côté de la frontière (via des outils de communication comme Skype, WhatsApp ou par téléphone). C’est là une des forces de l’organisation, qui lui permet de développer un réseau de contacts sécurisé dans la région tout en apportant une aide vitale aux personnes les plus durement touchées par le conflit.

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