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Shafi Nayebkhill : De Kabul à Juba

Publié le vendredi 26 septembre 2014

Membre de longue date de notre équipe nationale en Afghanistan, Shafi s’apprête à partir pour la première fois en expatriation. Direction : Soudan du Sud, où il sera confronté aux challenges d’un nouveau contexte.

Quand j’ai connu Solidarités International, on s’appelait encore Solidarités. Je vivais à Kaboul et je voyais le logo partout dans les rues. Même si l’image m’était familière, je ne savais pas du tout ce que ça représentait ! A l’époque, à Kaboul, rien ne fonctionnait : la construction du réseau d’eau n’avait pas pu être terminée, et le conflit avait fait beaucoup de dégâts. Les équipes de Solidarités mettaient en œuvre des activités WaSH (eau, hygiène et assainissement) et travaillaient sur le réseau d’eau, réparaient les pompes à main et construisaient des réservoirs. Là où il y avait un vide, elles cherchaient à le combler, et les activités de Solidarités étaient bien perçues par la population.

Mes premiers pas d’humanitaire

Un jour, j’ai entendu dire qu’une ONG internationale recrutait quelqu’un pour surveiller les stocks. Un ami m’a donné l’adresse du bureau. Quand je suis arrivé j’ai tout de suite reconnu ce logo que je voyais partout et ça m’a vraiment motivé. Mon enthousiasme a dû les marquer car ils m’ont embauché, et quelques mois plus tard j’étais nommé responsable des stocks au niveau national. Au bout de cinq ans, je suis devenu Coordinateur Logistique. Je suis d’ailleurs le premier membre de l’équipe nationale à occuper ce poste. Mais je ne serai pas le dernier : c’est mon adjoint, Raouf, qui a pris la relève et j’en suis très fier aujourd’hui.

Chez Solidarités International, ils ont toujours été prêts à me confier des responsabilités, à me donner l’opportunité de m’enrichir sur le plan professionnel et à développer de nouvelles compétences. C’est en partie pour ça que j’y suis si attaché. Et puis grâce à eux et à leur soutien, j’ai aussi obtenu un BBA (Bachelor of Business Administration). Plus récemment, je suis venu en France pour suivre une formation de plusieurs semaines en gestion de la chaîne d’approvisionnement à l’Institut Bioforce. Là encore grâce à leur soutien.

« Au Soudan du Sud, je serai confronté à de nouveaux défis. Les besoins humanitaires sont immenses. »

Aujourd’hui, je suis le premier de l’équipe afghane à être expatrié. Et ce n’est pas vraiment un hasard. Ce sont, entre d’autres facteurs, toutes les discussions que j’ai pu avoir avec les expatriés au fil des ans qui m’ont poussé à faire ce choix. Ils partageaient leurs expériences des autres missions sur lesquelles ils avaient travaillé et j’étais toujours très étonné de découvrir tous ces contextes différents. Au fond, je crois que j’étais un peu jaloux ! Et c’est ce sentiment qui m’a donné la volonté d’aller plus loin.

Ayant travaillé tant d’années dans le même contexte, dans le même pays, j’avais cette sensation de vivre dans une bulle. Je devenais trop à l’aise dans ce travail, il fallait que je me force à quitter cet univers. J’étais persuadé que je pouvais être utile ailleurs et cela devenait plus fort de jour en jour.

J’ai donc décidé de suivre le processus d’expatriation et ça a abouti. Solidarités International m’a proposé de partir pour le Soudan du Sud et même si je sais que cela ne va pas être facile, j’ai hâte d’aller aider les gens là-bas. Je vais être confronté à de nouveaux défis dans un contexte complètement différent où les besoins humanitaires sont immenses.

« Une ambiance conviviale, des projets pertinents : ça ne m’étonne pas que les expatriés aient du mal à partir ! »

Dans l’ensemble, les membres expatriés de l’équipe deviennent très vite attachés à la mission Afghanistan. Selon moi, il y a trois facteurs qui peuvent expliquer cette tendance. D’abord, c’est l’ambiance sur la mission, à la fois conviviale et professionnelle. On peut devenir amis avec ses collègues tout en préservant ce lien professionnel indispensable pour garantir la qualité de notre travail. Je pense que ce n’est pas comme ça chez toutes les ONG.

Ensuite, c’est aussi une question de fierté. Pour beaucoup d’expatriés, travailler pour Solidarités International c’est travailler sur la mission Afghanistan. Enfin, quand on met en place un projet pertinent dont on voit l’impact sur la population, à quel point les gens sont contents… bien sûr que ça donne envie de rester, voire de revenir. Après tout, c’est pour ça qu’on fait ce travail : pour améliorer les conditions de vie des gens. Quand on rassemble tous ces critères, ça ne m’étonne pas que les expatriés aient du mal à partir !

Ouvrir la voie pour ses confrères

Le Coordinateur WaSH actuel est un bon exemple de ce phénomène. Il est revenu trois ou quatre fois en Afghanistan : il ne s’en lasse pas ! Nous sommes même devenus de bons amis. Il a fait un discours lors de ma fête de départ en expliquant : « Ce n’est pas une décision facile que tu prends. C’est un choix courageux« . C’est encourageant d’entendre ça.

Bien sûr, ça va être dur de quitter mon pays, ma famille et l’équipe aux côtés de laquelle j’ai travaillé pendant presque quinze ans. Mais je sais que c’est une équipe solide. Je lui fais confiance et je sais qu’elle est tout à fait capable de gérer sans moi. Je ne me fais aucun souci pour elle !

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